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Infolettre novembre 2019


En attendant la rédaction des Actes de l'université 2019, nous vous proposons la lecture de la retranscription de l'atelier sur le dialogue interculturel. Vous pourrez lire le contre rendu d'un des autres ateliers  au mois de décembre.
Bonne lecture






Atelier : LE DIALOGUE INTERCULTUREL



« J’éprouve plus de difficultés à comprendre mes propres enfants… que mon voisins français… »

                                                                                                           Un père magrébin intégré en France



Dans quelles circonstances ai-je la possibilité de vivre un vrai dialogue interculturel ?

Sous quelles formes ?

Est-ce que la vraie rencontre interculturelle est possible ? 
Elle est plutôt rare, mais pas impossible…

Le dialogue est essentiel pour éviter des incompréhensions… il fait partie de la communication ordinaire.

Le vrai dialogue se vit dans une rencontre positive ou négative…c’est un engagement par rapport à l’autre… effort de comprendre l’autre, c’est faire un bout de chemin avec lui…





Les rencontres culturelles se font dans des circonstances ou lieux très diversifiés :



·                    Quotidiennement : un vrai dialogue exige davantage l’expression de sa propre culture pour plus d’unité communautaire afin de marcher ensemble … et une expérience forte de pardon ; avec le temps on s’apprivoise ; accueillir les confrères africains comme nos égaux, c‘est comme avec l’accueil d’un étranger dans une famille, une telle démarche est très différente de tout ce qu’on peut vivre dans la vie professionnelle ordinaire, parfois il y a difficulté de tutoyer les plus anciens, certains étant nos formateurs - l’étranger qui devient le membre de la famille…



·                    Époux musulman, marocain ou espagnol : les 15 premières années sont les plus difficiles ; l’éducation des enfants demande beaucoup d’effort et de compréhension mutuelle … ces enfants sont riches d’une double culture.



·                    Voisinage difficile : le bruit ; rendre service, parfois difficile quand il faut amener sa voisine (sans permis de conduire) en voiture au travail à 5h ; les odeurs de cuisine (sauces, poissons, etc.) ; accepter nos habitudes, notre culture qui sont enracinées en nous, …  « pour nous c’est le fromage »…



·                    Accueil chez soi : l’exemple d’un jeune guinéen en demande de papier, pendant 3 semaines c’est une véritable expérience à l’épreuve de l’âge, de la précarité et nos cultures ;



·                    Dans la vie professionnelle : à l’école (dans la même classe on se retrouve avec 2 enfants français perdus parmi les élèves majoritairement d’origine étrangère) ; à l’hôpital ( recevoir en consultation des femmes d’origine étrangère, essayer de comprendre les réactions différentes, etc.) ; dans la vie professionnelle, on est constamment confronté à ce geste de remettre le voile à la vue d’un homme ; Comment faire face à ces habitudes vestimentaires ? la confrontation à d’autres cultures nous interroge, par la vision différente du monde, par d’autres vérités, mais comment faire cohabiter cela ?…

·                    Dans la vie associative, des exemples :
 - Au Secours Catholique : avec l’accueil des migrants ; soucis de l’enfant ; accompagnements des familles musulmanes ; ce service exige beaucoup d’humanité, on constate qu’une véritable solidarité se vit entre les équipes et les bénéficiaires d’aide, ici on les porte dans la prière ;
 - CIMAD :  faire l’effort de sortir du schéma habituel ;
 - CAC :  Collectif d’Accueil des migrants sur Chaponost, c’est une vraie aventure sociale, une mobilisation collective ;
 - Aux Cartières : on découvre un peu le chemin à faire avec les Africaines ; la communauté est  internationale et missionnaire ; accueil des Africains en difficulté, projets pour l’Afrique ; les conditions pour la vraie rencontre interculturelle sont certainement beaucoup plus favorables en Afrique en mission sur le terrain, qu’avec les confrères ou migrants africains en Europe… ils sont là, parfois, par force des choses, reconnaissants ou pas ; on interroge que difficilement les migrants, on ne connait pas leur histoire ni vraiment leur parcours (comment va ta famille ?, cette salutation si naturelle en Afrique, ici devient comme une intrusion, il faut faire très attention pour ne pas blesser)… pour certains la relation et les échanges ne vont pas très loin ; les situations de stress et de dépendance ne facilitent pas la rencontre et le dialogue, on n’est pas à l’égalité ; la  rencontre ne sera jamais complète, ce sont des gens de passage… ; le temps est nécessaire ;  le fait de quitter son pays d’origine est  traumatisant ; dans nos échanges, il faut tenir compte de la personne qui vient de loin…. et pourtant elle est toute proche…
 - La Duchère à Lyon fait partie de certain nombre des quartiers construits en France pour accueillir les gens de l’Afrique du nord majoritairement musulmans, ce sont des vrais ghettos (chômage de 4e générations dans certains quartiers, violence, coup de feu, les gens qui déménagent ; « guerre » et règlement de comptes, café brûlés, etc.) ; en plus les musulmans de manière générale n’aiment pas se mélanger : voir les Zongo – quartiers très sales dans les villes au Bénin ; le brassage de culture et l’intégration à la société française ne sont pas si évidents ; 
 - Dans les quartiers populaires multiculturels difficiles où il serait important de vivre avec et vivre dans les mêmes conditions (égalité de vie) ; une réflexion est à mener : Comment faire pour mettre ces cultures ensembles ? l’humilité est un repère fort et relativiser les choses également afin d’observer et essayer de vivre une communion ;
 - Mouvement du Nid : au service des personnes sortant de la prostitution et de la rue, permet de rencontrer des personnes et des cultures différentes, de génération différente ; avec l’expérience de la différence culturelle, il y a forcément une rencontre, ce qui n’est pas toujours le cas avec les personnes de la même nationalité, et des compatriotes de génération différente ; 
 - Session Welcome aide les nouvellement arrivés, prêtres, religieux, à mieux s’intégrer dans la réalité culturelle et sociale française …
 - Blablaca : ce stop moderne organisé est une belle occasion de rencontrer les gens très différents.





Nous avons identifié plusieurs types ou formes du dialogue interculturel :



*Dialogue religieux : il fait partie du dialogue interculturel, puisque la religion est une des expressions culturelles…



-                     Les chrétiens sont en permanence en dialogue avec le monde juif, à l’université c’est toujours une rencontre au niveau de la foi et de la culture (reproches qui traversent les siècles : on a pris votre place… dans la foi, le refus du Christ empêche de comprendre la vocation propre qui relève du peuple juif, le christianisme s’enracine dans le judaïsme) ; l’amalgame peut devenir mortel pour l’un comme pour l’autre, au point de ne plus pouvoir se comprendre soi-même, cet échange est donc de l’ordre vital, c’est un éclairage mutuel (religieux, philosophique, scientifique, etc.) sur les origines, les racines et les vocations respectives ; la culture ibo (juifs africains) qui adopte le foulard à l’église ;



-                     Dialogue œcuménique : se vit facilement et tout naturellement à la chorale protestante (chorale œcuménique)



-                     Dialogue islamo-chrétien :  sur Lyon se vit sous forme des conférences (Vaulx-en-Velin, St Bonaventure, etc.) : tous ne sont pas forcément favorables à ça ;



*Dialogue « imprévu » fait partie des circonstances et des situations de la vie courante… il suffit d’être attentif à ce qu’on vit… et d’avoir un peu de curiosité pour aborder et pour rencontrer l’autre, « son prochain » à l’arrêt de bus, son voisin qui promène son chien ou le chat, etc.) …



On s’ajuste à la personne dans le dialogue, le temps de silence est important aussi (espace pour le *dialogue intérieur).





Quelques conditions pour vivre le vrai dialogue :



·                    l’humilité est un repère fort, relativiser les choses aussi…

·                    prendre le temps d’observer pour pouvoir ensuite vivre une communion 

·                    les réunions,  si possible, pour faire circuler la parole, est libérateur…

·                    la confiance pour un vrai dialogue… établir la confiance n’est pas si évident, on la gagne, il faut être vrai d’abord avec soi-même

·                    savoir s’effacer pour que l’autre puisse prendre sa place

·                    la patience

·                    l’effort mental est à faire comme dans tout apprentissage, comme pour une langue étrangère et parfois, il faut apprendre à parler la langue pour surmonter nos propres idées reçues et nos préjugés, etc.

·                    la place à donner et le goût de l’imprévu qui doit nous conduire dans le dialogue…


Quelles sont mes réactions dominantes et habituelles dans cette situation ? Pourquoi celles-là ?
 - Un peu de méfiance : face à la saleté qui contraste avec des roulotes très propres à l’intérieur ou un habillement très élégant ; on est un peu déstabilisé ou déconcerté par cette incohérence, inconséquence ;

 - Une réserve, une prudence…

 - Un choc : face à la burqa intégrale qui cache le visage de la personne, dans le fond cela ressemble à une protection, cela peut être agressif en soi ; imposer certaines règles par rapport au pays d’accueil avec ses valeurs républicaines et le conjuguer avec le vivre ensemble sont compliqués, on se défie mutuellement dans la démonstration des forces entre l’État « policier » et l’individu insoumis, etc. ;

 - Une certaine déception par le manque de sincérité dans le dialogue, des circonstances particulières fortement déroutantes qui conduisent à une crise, on ne comprend plus rien…

 - Une fermeture au dialogue, peut être motivée et justifiée ;

 - Une peur :  il y a des gens qui disent de fermer les frontières pour protéger notre identité ;

 - Une manière fondamentaliste : notre culture c’est la meilleure culture, on est convaincu de la supériorité de ma culture ; cette attitude bloque le dialogue ; on veut ramener l’autre à soi …

 - Mais si « On ne montre pas sa maison avec la main gauche… » (proverbe africain), on dit que l’on a du respect pour notre propre culture, dans le dialogue, on fait ainsi une expérience de kénose, du dépouillement … Chaque culture a quelque chose de figé, mais elle bouge aussi pour ne pas se scléroser et disparaitre un jour : la culture française a toujours été influencée au cours des siècles et s’est enrichie par d’autres cultures…

 - Nous avons besoin de savoir d’où nous venons et qui nous sommes et en même temps de nous confronter aux autres pour s’affirmer dans notre identité ; la question des racines est très importante, nous avons besoin de savoir qui nous sommes pour notre équilibre vital, il n’y a pas de dialogue vrai sans identité enracinée ;

Se rendre disponible pour comprendre la personne, l’écouter, faire un effort pour rentrer dans sa logique, habituellement on juge trop vite à partir de nos propres critères ; il est important de s’abstenir de projeter nos propres raisons, de mettre en suspense les références de notre propre culture ;

 - Il est important d’accepter la différence pour prendre en compte la personne, qui est devant nous, sans oublier de dire qu’on n’est pas toujours d’accord non plus…

 - Accepter l’autre pour lui redonner confiance : l’envie de comprendre l’autre… tel qu’il est… là où il est, c’est possible de parler et il y a un vrai plaisir dans la rencontre, « comme avec mes copines musulmanes …elles ont une manière surprenante de voir les choses… »


Qu‘est-ce que j’attends de ce dialogue ? Qu‘est-ce que j’en tire pour l’expression de ma foi ?
 - Rentrer en dialogue, c’est déjà faire une démarche pour avoir moins peur… des autres ; on respecte la foi de l’autre…

 - Ouverture chrétienne jusqu’aux périphéries…

 - Enrichissement au contact des autres

 - Marcher ensemble dans nos diversités : se sentir reconnu avec respect… considéré cette personne avec sa part de vérité ; on peut réorganiser les choses en fonction de nouvelle habituds, tenir compte de la sensibilité de l’autre ;

 - Expérience de la foi se déploie dans le dialogue : Dieu est à l’œuvre…
Nous vivons une période où le dialogue est inévitable, il faut le vivre de manière positive (en Algérie l’église de la rencontre par sa simplicité de vie témoigne de l’ouverture chrétienne) ;

 - Souhaits que les échanges soient sereins pour un vivre ensemble… : la France accueillante mais elle a d’abord beaucoup rejeté par stigmatisation… italien, polonais, rejet dans le premier temps…

 - Dans les écoles, il doit y avoir un devoir d’éduquer, de protéger notre humanité commune, d’apporter une aide à chacun, faire face au durcissement

 -"Logos", dialogue est une croissance en humanité…

CONCLUSION

On se rend compte que la frontière entre le dialogue interculturel et religieux est très mince…
Dialoguer c’est savoir écouter, c’est accepter ce que nous sommes dans notre identité propre pour passer par un autre… pour s’enrichir de lui. L’autre inconnu, oblige continuellement de travailler sur soi…
C’est une sorte d’ascèse : sortie de nos conforts et acquis pour nous laisser transformer. Refuser cette nouveauté et cette ouverture, c’est mourir … L’autre différent de moi, est gardien de ma vie

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