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Infolettre février 2018


Le phénomène des jeunes africains non accompagnés dans le flux des migrants africains en Europe et particulièrement en France est un développement récent et particulièrement dramatique. Je peux aussi écrire en titre :«Jeunes, migrants, africains, isolés».
Pris séparément, chaque terme a son lot de fragilité : jeunesse en marche vers la maturité et donc manque d’autonomie, réajustements aux nouveaux repères culturels et socio-économiques suite au déracinement de la migration, africain perçu comme pauvre et sous-développé, solitude aggravée par la jungle de la traversée du désert et de la Méditerranée et de l’accueil réservé en Europe. Réunis en une seule personne, cela devient une calamité absolue face à laquelle aucune personne humaine ayant un cœur en place ne peut rester indifférente.







Depuis le mois d’octobre 2017, Chaponost est confronté à une arrivée régulière des jeunes africains migrants non accompagnés. Le flux va continuer et s’installer dans la durée parce que le département du Rhône a installé à Chaponost le bureau qui doit faire l’évaluation de leur minorité et de leur isolement. Comme ces jeunes migrants arrivent deux ou quatre jours avant le jour du rendez-vous, ils doivent être hébergés quelque part pendant ce temps. La municipalité n’a pas de place pour eux. Après ce temps de la Nativité, cela rappelle étrangement ce qui était arrivé à Joseph et Marie à Bethlehem : "Il n’y avait de place pour eux dans la salle d’hôtes’’ (Lc 2, 7). En plus, la municipalité pense ne pas devoir ouvrir un espace d’accueil pour des mineurs migrants, parce que cela relève de la responsabilité de l’état, notamment du département, et non pas d’une municipalité.

Ce sont des privés (individus, associations) qui font le relai, en l’occurrence c’est le presbytère de Chaponost qui leur ouvre ses portes, c’est la maison des Cartières qui en accueille quelques uns, c’est enfin le Collectif d’Accueil de Chaponost (CAC) qui mobilise ses membres pour en accueillir dans leurs maisons ou apporter une assistance matérielle à ceux qui accueillent : nourriture, boissons, vêtements, etc.

Aux Cartières, en 50 jours, nous en avons accueilli 17 dont une fille. En terme de "homme-nuit’’, nous totalisons 38 personnes-nuit, c’est-à-dire une personne au mois tous les deux jours. La paroisse en accueille encore davantage. La somme de tous ces jeunes accueillis est énorme en un si petit laps de temps. Le département, qui nous a dit que ce n’était qu’un début d’un phénomène qui va s’amplifier et durer au moins trois décennies, commence à réfléchir à comment y faire. Nous avons tous à y faire face aussi. J’y reviens plus loin.

Quand on reçoit ces jeunes, on voit qu’ils sont tellement fatigués que la première chose qui leur importe est de se reposer : ils peuvent dormir presque toute la journée. Le grand froid auquel ils ne sont pas habitués et contre lequel ils ne sont pas équipés n’y est pas pour rien. Dans le peu d’échanges qu’on peut avoir avec certains, on comprend le dur parcours qu’ils ont fait. Ils viennent surtout de l’Afrique Occidentale, notamment de la Guinée Conakry, du Mali, de la Côte d’Ivoire. J’ai vu aussi un ou deux venant du Cameroun. Dans tous les jeunes qui ont accepté de dire quelque chose, il y a au départ une famille dysfonctionnelle ou un drame familial : orpheline exploitée sexuellement, une seconde épouse de papa qui ne supporte pas la présence de l’enfant, un père ivrogne, etc. Alors, avec des amis qui ont entendu parler de quelqu’un qui aide à partir chercher la vie ailleurs, ils ont pris un véhicule pour la Lybie ou le Maroc, à travers le désert. Puis la longue et pénible attente de la traversée de la Méditerranée, des copains morts, la promiscuité, la faim et la soif, l’impossibilité de faire marche en arrière, tous les cas de figure des horreurs. Enfin l’arrivée en Italie ou en Espagne, puis le désir d’arriver en France parce qu’ils ne comprennent par l’italien ou l’espagnol, encore que même le petit français qu’ils ont est de fort peu d’utilité sans accompagnateur.

Il faut savoir y faire face. Les mineurs, dit-on, c’est la responsabilité de l’Etat. Il y a en effet  la structure de l’Assistance Sociale à l’Enfance (ASE), de Protection de l’Enfance, etc. Mais c’est de notoriété publique que leurs structures sont débordées et ne peuvent plus – ne veulent plus non plus peut-être ? – y faire face toutes seules. En plus, l’accueil des mineurs fait l’objet d’un encadrement particulier. Vu qu’ils sont vulnérables, il ne leur faut pas seulement un lit et un couvert, mais aussi une protection spéciale que seul l’état peut garantir. 

Indépendamment de toutes ces considérations importantes et nécessaires, les Missions Africaines et toute la famille SMA ont fait de l’attention et de l’accueil des migrants, spécialement ceux d’origine africaine, une priorité. Dans cet engagement, il n’est pas fait une discrimination de sexe, de religion, ni d’âge. 
Un phénomène migratoire massif qui va s’étendre dans la durée. Une option missionnaire affirmée d’être aux côtés des migrants africains en France. Une présence presque complète de toutes les entités de la famille des Missions Africaines autour de la maison et domaine des Cartières à Chaponost, où va se trouver la structure charnière de la gestion de la catégorie "migrants jeunes non accompagnés’’ dans le département. Un appel du pied presqu’explicite du département d’aller au secours pour ces peuples que, par charisme, les Missions Africaines comprennent et servent naturellement … Il me semble évident qu’il y a un appel fort par ces signes que quelque chose doit être entreprise. Beaucoup de choses sont déjà faites dans ce sens-là partout où la famille SMA vit. Loin de les sous-estimer, j’estime que quelque chose en plus et de plus structurée devrait être mise en place aux Cartières pour l’accueil des migrants.
Je ne doute pas que c’est une entreprise délicate, qui demande beaucoup de travail, de compétence et de ressources. En plus de faire confiance au Seigneur, je voudrais croire que la ressource  première dans cette entreprise étant la ressource humaine compétente, la famille des Missions Africaines peut  la trouver en son sein ou se la donner, y compris les compétences afférentes. Les autres ressources matérielles et financières pourront être trouvées dans les institutions publiques et/ou privées avec d’autant plus de facilité que les compétences réunies dans le projet inspireront confiance. Mais Dieu, qui lance l’appel, ne manquera pas de pourvoir aux moyens. L’établissement de nos Eglises en Afrique n’en avait rien exigé de moins.

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